Un Cubain, dos tourné à la mort
Paseo del Prado, La Havane, (4 avr. 2016)
Le régime de visibilité de celui qui regarde est autarcique. Sa vue est imprenable et nul ne peut savoir ce qu’elle comprend. J’ai voulu photographier cette énigme en surprenant un cubain sur l’immense avenue de La Havane, le Paseo del Prado. Il scrutait je ne sais quoi en direction de la mer. Je n’ai, bien sûr, jamais su ce qu’il regardait.
Cependant le plan large de ma photographie montre une circonstance intéressante de ce geste inexplicable. Il montre un homme qui tourne le dos à la mort, ici représentée par la peinture murale d’un squelette orienté dans la direction opposée à ce que l’homme regarde.
Une autre circonstance est la date où cette photo a été prise. Ce jour-là, des ouvriers commençaient à dresser les estrades où déambulerait un mois plus tard le défilé de Chanel. Trois semaines auparavant, Barak Obama avait emprunté cette même voie pour son entrée triomphale à Cuba.
Ma photographie avait mis en scène, à mon insu, un regard en direction de l’avenir de Cuba.