Quand Vasco Ascolini photographie la danse, il tente de réconcilier la méditation de son regard avec la mouvance indocile de son objet : l’élan physique et créateur du corps dansant.
Il ne s’agit pas pour lui d’arrêter une figure du corps se déplaçant ou de montrer les moments gymniques d’une évolution sur scène, mais d’exiger de la photographie une sensibilité aux intentions spirituelles de la danse, aux signes qu’accomplit le danseur en direction de l’absolu.
Il arrête les gestes aériens des corps mobiles pour inscrire toute silhouette dansante comme la signature nébuleuse d’un passage émouvant dans le cadre instantané de l’espace et du temps. Sous les feux de la rampe, ou dans le noir permanent, la forme physique se découpe – ombre hirsute ou éclair révélant – comme une idée claire et soudaine échappée de l’inconnu.
Au spectacle des chorégraphies de Maurice Béjart ou de Martha Graham, les photographies ne sont pas des instants volés à l’art ou découpés à la hâte; elles constituent des essences réfléchies du mouvement, des séquences hiératiques traitées par la lumière comme des bas-reliefs. On dirait la danse faite âme saisie par la suspension de la pose, les images photographiques devenant les fragments de cette âme.
À suivre les impulsions et la détente des corps conversant avec le vide volumineux de l’espace, Vasco Ascolini trouve la formule visuelle de l’enchantement chorégraphique : le danseur, perdu de vue dans ses propres rebonds, tourniquets et entrechats, délivre sur la pellicule comme un fantôme de lui-même, un physique nuageux et presque “soluble dans l’air”. La seule réalité que le photographe capture alors des corps se mouvant, c’est la direction pure du sens où conduit leur élan.